Entrevue avec Agnès

, par jacques

  • La figure humaine est au centre de votre sculpture. Est-ce un hasard ?

La figure humaine me passionne. J’ai hérité d’une tradition très classique, curieusement cela m’a beaucoup aidé : cela me donne, je crois, la possibilité de m’en servir comme d’un simple outil pour déconstruire l’anatomie, et me laisse libre pour reconstruire selon ma propre sensation.

  • Pourquoi recourir au modelage ?

L’intérêt du modelage est d’aller du vide vers la forme. C’est l’espace qui décide, qui façonne les figures, qui en retient certaines parties plutôt que d’autres, il reste des blancs.
D’un autre côté, la terre, elle n’apporte pas, elle reflète ce qu’on lui donne. On ne peut rien en attendre, c’est toujours l’impulsion qui la fait vivre.

  • Une composition revient sans cesse dans votre travail, deux corps ensemble, des passants, parfois inscrits dans des escarpements. Qu’y a-t-il entre ces figures ?

Je ne cherche pas à raconter une histoire. On pourrait parler de pietà ou de couple. C’est plutôt une seule entité, une même tension que je cherche dans mes deux figures. Je ne sais pas laquelle soutient l’autre.

Mon sujet, je crois, c’est le rapport de l’équilibre et du déséquilibre. Je fabrique un déséquilibre pour m’ap­procher un peu du réel. C’est le moyen que j’ai trouvé.
À la limite de l’équilibre et du déséquilibre, il y a une faille sur quelque chose, quelque chose que je ne connais pas encore.
Evidemment, on voudrait toujours donner une permanence à la fuite du temps. Mais la fugacité du réel, c’est tellement difficile ; la terre, le bronze fixent toute chose. C’est ce conflit qui me donne envie de recommencer.

Entretien de Claude Weil avec l’artiste, catalogue Fondation Arp-Galerie Vieille du Temple, 1994